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Les taux négatifs peuvent-ils être la future arme de la Fed ? (Aurel BGC)
information fournie par Boursorama 22/02/2016 à 17:59

La Fed pourrait-elle suivre la BNS et la BoJ en adoptant des taux directeurs négatifs ?

La Fed pourrait-elle suivre la BNS et la BoJ en adoptant des taux directeurs négatifs ?

En cas de fort ralentissement économique aux Etats-Unis, Aurel BGC estime que la Fed préfèrerait abaisser ses taux directeurs en territoire négatif plutôt que lancer un nouveau plan de « quantitative easing ». Pourquoi, et avec quels problèmes juridiques ?

Depuis la grande crise de 2008, les banques centrales ont massivement soutenu l'activité économique grâce à une politique de taux zéro facilitant le financement des projets d'entreprises tout en permettant au secteur privé et aux ménages endettés de renégocier leurs crédits à leur avantage.

Dès 2008, la Fed s'est surtout lancée dans des plans dits de « quantitative easing » (assouplissements quantitatifs), consistant à racheter des obligations (dettes financières) sur les marchés. L'exemple américain a été suivi ultérieurement par la Bank of Japan puis la BCE. L'objectif était également de rassurer les investisseurs en leur prouvant que les banques centrales seraient toujours prêtes à tout pour assurer le bon financement de l'économie en cas de difficultés.

Pour autant, la mode du « quantitative easing » commence à s'épuiser. Le plan de « QE » américain a pris fin en octobre 2014. Le plan de la BCE, lancé en mars 2015, a du mal à porter ses fruits, et les progrès enregistrés sont bien maigres face aux sommes colossales mises en jeu (pour la BCE : 60 milliards d'euros d'achats mensuels jusqu'en mars 2017).

La Fed commence à douter de l'intérêt du « quantitative easing »

Dans ce cadre, les analystes d'Aurel BGC notaient récemment que « Selon les minutes des réunions du FOMC, les limites des QE ont fait l'objet de discussions entre ses membres à la fin de l'année dernière (…). Plusieurs banquiers centraux se sont montrés critiques et déçus de l'efficacité des QE. Au regard de l'ampleur des injections de liquidités par la banque centrale, la réponse de l'économie réelle est jugée très faible ».

La même source poursuit : « Certains d'entre eux ont mis en avant la difficulté pour la banque centrale de revenir en arrière et de revendre sur les marchés ces actifs achetés. De fait, Mme Yellen avait indiqué dans une conférence de presse, que la banque centrale ne retrouvera pas une taille "normale" de son bilan avant une dizaine d'année, au mieux ».

Les achats successifs d'obligations sur les marchés financiers ont en effet provoqué un gonflement spectaculaire du bilan des banques centrales à des niveaux jamais vus auparavant.

Rappelons que pour une banque centrale, le fait d'avoir des milliers de milliards d'actifs sous gestion n'est pas un danger, car même en cas de faillite d'émetteurs, les pertes réalisées se traduiraient simplement par une destruction de monnaie plutôt indolore pour l'économie. Il n'en reste pas moins que les faibles résultats économiques obtenus via le « QE » dans l'actuel contexte d'inflation zéro ne plaident pas pour une utilisation à l'infini de cette solution.

La Fed, à défaut de mieux, pourrait faire le choix des taux négatifs

On souligne depuis le début de l'année que la Fed semble désormais bloquée dans sa politique monétaire, ayant commencé à remonter ses taux directeurs en décembre, alors même que les indicateurs économiques américains traduisent quelques faiblesses conjoncturelles.

« Au total, la Fed peut paraître désarmée aujourd'hui. En janvier, les membres du FOMC ont constaté un durcissement des conditions de financement de l'économie lié à la volatilité des marchés et aux incertitudes internationales », commente Aurel BGC.

« Certains banquiers centraux ont donc émis la possibilité, en cas de nouveau choc, d'utiliser l'arme des taux d'intérêt négatifs » observe le courtier, qui prend cette option très au sérieux : « comme beaucoup d'économistes suivant la politique monétaire de la Fed, nous anticipions l'utilisation éventuelle de cette arme, plutôt qu'un QE, lors de la prochaine récession ou choc [économique] ».

Cela ne veut pas dire que la Fed pourrait être amenée à employer cette « arme » dans les mois prochains, mais plutôt dans un avenir plus ou moins lointain en cas de retombée du pays en récession, ce qui est encore loin d'être le cas. En ce sens, la Fed imiterait la BNS suisse ou la Bank of Japan, qui ont toutes deux fait le choix de taux directeurs négatifs (-0,75% et -0,1% respectivement) pour inciter les entreprises et les ménages à dépenser leur argent plutôt qu'à l'épargner.

À noter que « cette mesure n'est pas "populaire" auprès des banques américaines » rappelle le courtier, alors que les taux directeurs négatifs pénalisent les groupes bancaires classiques, qui perdent de l'argent en plaçant leurs réserves auprès de leur banque centrale.

La Loi pourrait-elle empêcher la Fed d'appliquer des taux négatifs ?

Surtout, « Mme Yellen a mis en évidence [certains] "risques juridiques" » liés à l'abaissement des taux directeurs de la Fed en territoire négatif. « Les problèmes posés par des taux négatifs sont de trois types », détaille Aurel BGC :

En premier lieu, « La loi de 2006, qui a autorisé la Fed à payer des intérêts directement aux banques n'a jamais envisagé des taux d'intérêt négatifs ». Ainsi, « les dépôts des banques auprès de la Fed peuvent être rémunérés, mais un taux négatif pourrait être considéré comme un impôt sur les réserves des banques ». En ce sens, la Fed « prendrait le risque d'un recours des banques devant les tribunaux ». À noter cependant que « la banque centrale peut "facturer" aux banques des services. Les banques paient déjà la banque centrale pour garder leur or. Le Fed pourrait utiliser cet argument juridique pour mettre en place des taux négatifs sur les dépôts », résume Aurel BGC.

Deuxième risque : l'application de taux négatifs pourrait en partie être contournée par les banques grâce à quelques astuces simples. « La banque centrale n'a pas le droit de percevoir un taux d'intérêt négatif (ou verser des taux d'intérêt) sur certaines institutions financières comme Fannie Mae, Freddie Mac ou les Federal Home Loan Banks qui déposent leurs liquidités excédentaires auprès de la Fed. Les banques pourraient alors déposer auprès de ces institutions leurs réserves excédentaires (moyennant une rémunération inférieure aux taux négatif de la Fed). Elles échapperaient alors, en partie, à cette mesure », explique toujours le courtier.

Enfin, troisièmement, « Le coût/bénéfice de taux négatifs pour les Etats-Unis est mal connu ». « Il ne faut pas avoir un impact trop négatif sur la profitabilité des banques pouvant induire un violent durcissement des conditions de crédit. Il faut aussi tenir compte de l'impact de cette mesure sur le marché des changes et, plus généralement, sur le comportement des marchés financiers », notamment en ce qui concerne les marchés actions qui pourraient connaître une éventuelle bulle.

En somme, même si l'application de taux directeurs négatifs par la Fed reste une solution privilégiée en cas de choc économique, une telle décision susciterait sans doute autant de débats et de scepticisme que les précédents plans de « quantitative easing ». Mais dans le monde de la finance, qui ne tente rien n'a rien.

X. Bargue (redaction@boursorama.fr)

8 commentaires

  • 29 février 10:04

    le capitalisme est mort depuis longtemps !!vivement que l'on cesse cet acharnement scandaleux et dangereux pour l'ensemble des populations !!


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